Fioretti de saint Jean Bosco # 33

Une guérison à retardement

Fioretti de saint Jean Bosco # 33

Fioretti de saint Jean Bosco

  1. Une guérison à retardement

Contrairement au récit qui précède voici un miracle qui fut à la fois très lent et très rapide… la seconde condition étant requise, comme nous l’avons vu, pour qu’on puisse parler de miracle.

Le fait s’est passé à Neuilly, près de Paris, dans ce coin de banlieue où abondent les riches demeures. Dans une de ces villas cossues se mourait, en 1883, une petite Marguerite de Cholet. Les docteurs les plus réputés s’étaient penchés sur son cas. Aucun n’avait pu lui apporter un réel soulagement. Découragée la jeune fille attendait la mort… Afin de s’y préparer elle avait appelé un prêtre et reçu les derniers sacrements. Comme on le voit la situation était grave. Or il se trouva que Don Bosco vint à Paris cette année-là, faisant courir toute la capitale, ameutant même les célébrités, tel Victor Hugo ou le Prince Czartoryski dont le fils aîné devait devenir un disciple fervent du saint. La famille de Marguerite entendit parler de l’illustre thaumaturge italien. Nouveau François de Paule, il passait pour semer les guérisons sous ses pas. Elle lui écrivit donc, le priant de venir à Neuilly bénir l’adolescente qui se mourait. Don Bosco s’y rendit, entre deux courses en ville.

S’approchant du lit de la malade, il lui dit : « Avez-vous la foi ? »

— Oui, mon Père, répondit madame de Cholet pour sa fille, qui n’avait déjà plus de voix.

— Alors, vous guérirez, assura le saint, car la foi obtient tout. Récitez simplement chaque jour un Pater, un Ave et un Gloria en l’honneur du Cœur Miséricordieux de Jésus. Ajoutez-y un Salve Regina afin que la Vierge Auxiliatrice vous prenne sous sa protection. Et faites cela jusqu’au 15 août !

— Jusqu’au 15 août, gémit la pauvre maman. C’est bien loin, mon Père ! On était en effet en mai. Quand je pense que vous n’auriez qu’à prendre ma fille par la main et à lui dire de se lever…

— Faites ce que je vous dis, insista Don Bosco. De mon côté je prierai et ferai prier mes enfants à votre intention. » Puis le saint se retira.

La malade avait suivi cette conversation comme dans un rêve. La visite terminée elle eut une quinte de toux terrible et de jour en jour son état empira. Chaque nuit elle brûlait de fièvre, n’arrivant pas à fermer les yeux. Sa maigreur devint effrayante. Deux mois après la visite de Don Bosco elle était devenue un vrai squelette. Sa mère, désolée, comptait les jours qui la séparaient de la fête du 15 août.

Le prêtre turinois avait-il dit vrai ? Sa fille pouvait-elle guérir alors qu’elle paraissait avoir déjà un pied dans la tombe ? Avoir la foi, c’est beau à dire… mais quand on voit que les choses vont de plus en plus mal, et cela malgré les prières faites avec ferveur, on la perd ! Et cette maman sentait qu’elle perdait confiance en Dieu… Enfin, le 15 août arriva. La malade était toujours dans son lit, pâle comme une morte. Guérir aujourd’hui, se disait Mme de Cholet, ce ne serait pas une guérison mais une résurrection ! Comme elle se préparait pour aller à la messe paroissiale, elle entend soudain sa fille qui lui crie : « Maman, je suis guérie ! » La pauvre femme bouleversée accourt. Elle trouve la mourante assise sur sa couche, rayonnante de joie. Il lui semble même que son teint est quelque peu rosé… « Vite, donne-moi mes vêtements, je t’accompagne à l’église ! » On apporte quelques effets à la jeune fille, elle les passe avec des gestes quelque peu saccadés mais sans l’aide de personne. Une demi-heure plus tard elle est agenouillée auprès de sa mère et suit la messe paroissiale. Evidemment elle remercie Dieu par une fervente communion, unissant dans une même action de grâces Celle qu’elle a invoquée quotidiennement depuis le mois de mai, la Vierge Auxiliatrice. Le miracle tint bon puisque par la suite la jeune fille se maria, devint maman de trois robustes enfants et ne mourut qu’à l’approche de ses quatre-vingt printemps !

Grâce à retardement… voulue sans doute par la Providence pour mettre à l’épreuve la foi de deux chrétiennes qui, gâtées par la fortune, n’éprouvaient sans doute que médiocrement le besoin de faire confiance au ciel !