Fioretti de saint Jean Bosco # 39
Un titre curieusement gagné
Fioretti de saint Jean Bosco
- Un titre curieusement gagné
Le 3 avril 1881 mourait près d’Hyères, à l’âge de seize ans, le jeune Louis Fleury Colle, fils de Maître Colle, avocat au barreau de Toulon. Don Bosco appelé d’urgence au chevet du malade ne put que lui promettre le ciel et préparer ses parents à la douloureuse séparation. Mais voici qu’au lendemain de sa mort, Louis apparut au saint, de retour à Turin… Il se promenait dans une sorte de merveilleux jardin en compagnie d’autres jeunes gens ayant vécu à l’Oratoire et qui étaient morts comme des saints. D’autres apparitions, en forme de songes, se répétèrent fréquemment au cours des mois et des années qui suivirent. Il semblait que le ciel eût choisi le jeune toulonnais pour être son messager attitré auprès du thaumaturge italien…
La plus importante de ces visions semble avoir été celle de la nuit du 30 août 1883, fête de sainte Rose de Lima, gloire de l’Amérique Latine.
Don Bosco se vit soudain transporté durant son sommeil dans un vaste salon où de nombreuses personnes causaient des missions, déplorant que tant de païens peuplent encore l’Australie, l’Inde, la Chine, le Continent Noir et l’Amérique du Sud. Comme le saint se demandait la signification de ce rassemblement et surtout ce qu’il faisait, lui prêtre, au milieu de tous ces laïcs inconnus, voici que s’avance vers lui un adolescent au visage souriant, la silhouette comme auréolée de lumière. Don Bosco a vite reconnu en lui son jeune confident de Toulon. « Je viens vous apporter un peu de travail, dit Louis. Mettez-vous devant ce bureau et déroulez cette corde. » Il y avait sur une table voisine un peloton de grosse ficelle où apparaissait une série de chiffres. En regardant de près le saint comprit qu’il s’agissait de degrés de latitude… Arrivé au nombre 47 il trouva un nœud. Là, la corde se divisait en petites cordelettes partant en direction de l’Orient, de l’Occident et du Midi. A ce moment apparut sur le bureau comme une carte en relief où se profilèrent tour à tour fleuves, savanes et hautes montagnes. Cela se prolongea jusqu’au nombre 55. « Voilà la mission réservée aux salésiens, reprit Louis. Il y a là des milliers d’habitants qui attendent leur aide, c’est-à-dire la foi ». Le saint ajoute qu’après cela il se vit installé dans une sorte de wagon de chemin de fer, toujours accompagné de son céleste mentor. Si Don Bosco avait vécu quelques années plus tard il eût parlé d’avion… car en réalité c’était dans les airs qu’il était transporté, regardant par un hublot qu’il dénomme «fenêtre» de son compartiment ! Parti d’Amérique Centrale il survola le Venezuela, la Bolivie puis l’immense Brésil. Là, le jeune Colle lui fit admirer une vaste cité qui n’était autre que la moderne Brasilia. L’Uruguay, le Paraguay, l’Argentine et la Pampa défilèrent ensuite sous les yeux des voyageurs qui ne s’arrêtèrent qu’au détroit de Magellan. Durant ce prodigieux parcours le jeune Louis Colle fournit à son compagnon d’exploration une documentation étonnante sur la faune, la flore, les ressources de ces régions, allant jusqu’à indiquer les puits de pétrole qui furent découverts en 1950 dans la Terre de Feu !
Seul le tintement des trois coups de l’Angélus du matin mit fin à cet étrange survol. Or, ce cours unique de géographie, qui fut longuement rapporté par Don Bosco à ses fils, eut une conséquence inattendue. Lorsque le gouvernement brésilien construisit sa nouvelle capitale, baptisée Brasilia, on s’aperçut qu’elle était située à l’endroit même où Don Bosco l’avait vue en songe en 1883 ! Ainsi la vision nocturne était devenue prophétie !
Désireuses de souligner cette coïncidence, les autorités brésiliennes proclamèrent saint Jean Bosco, en 1958, patron de Brasilia, tandis que la Sainte Vierge en devenait, sous le nom d’Aparecida, la protectrice céleste.
Le saint de Turin, qui aimait à dire qu’il voulait être « à l’avant-garde du progrès » peut être satisfait de cette promotion ! La ville de Brasilia est en effet aujourd’hui la plus moderne qui soit au monde… Certains l’ont même surnommée, à cause de son architecture futuriste « la cité du XXIIe siècle ! »