CELIBAT ET DISPONIBILITE - 4
Réflexion du P. van Bavel
CELIBAT ET DISPONIBILITE
(cf. T. J. van Bavel, Le cœur de la vie religieuse)
Le célibat religieux n'assure pas nécessairement une plus grande disponibilité aux autres. Pourquoi les personnes mariées ne devraient-elles pas être aussi disponibles que les personnes célibataires ? De plus, il faut faire preuve de prudence quant à la disponibilité. D’ailleurs, fonder une famille est aussi un service indispensable au progrès de l'humanité et au Royaume de Dieu. Une petite considération montre clairement que si tout le monde poursuivait le célibat comme un idéal et ne voulait plus d'enfants, l'humanité cesserait d'exister d'ici cent ans ! Ainsi, en si peu de temps, le monde peut finir.
Il y a une petite différence de valeur émotionnelle entre les mots « célibat » et « virginité ». Le célibat exprime plus le négatif 'être célibataire', tandis que la virginité contient plutôt un aspect positif : à savoir la fraîcheur et la force ('virginitas' correspond probablement à 'vireo' = être frais, fort, puissant). À partir de là, on pourrait commencer à faire la lumière sur le sens profane ordinaire de la virginité ou du célibat. Ils auraient alors le sens de concentrer l'énergie sur un point ; consacrer tout son temps et sa force à une valeur particulière. Il n'est pas rare qu'une personne soit tellement attirée par une valeur ou une autre qu'elle laisse beaucoup d'autres choses. Il peut arriver qu'une personne soit tellement touchée par un certain besoin dans le monde qu'elle le considère plus urgent qu'une vie conjugale propre. Par exemple, une personne peut se concentrer sur l'art, la science, une découverte médicale, une mission politique, un travail social. On ne peut prétendre que ces valeurs sont inconciliables avec la vie conjugale ; en principe, aucune valeur n'est inconciliable avec cela. C'est plutôt une question de pratique et de jugement personnel. On peut devenir tellement absorbé par un travail, une profession ou une mission qu'on considère qu'il est irresponsable de se marier, parce qu'on consacrerait trop peu de temps et d'attention à son mariage ou ne s'y intéresserait pas assez. Le renoncement ne résulte donc nullement d'une sous-estimation ou d'un mépris du mariage ; c'est plutôt le contraire. Par exemple, le célibat est souvent lié à une profession, une activité sociale ou religieuse ; avec des tâches qui nécessitent un investissement important en temps et en force. Ceux qui se donnent pour tâche de « se charger » d'une famille peuvent trouver plus difficile de se permettre un tel investissement.
Peut-être peut-on associer la disponibilité religieuse d'une manière particulière à certaines activités, qui bien sûr ne rapportent rien ou pas assez pour subvenir à ses besoins. Je pense ici à la préservation de l'héritage spirituel ancien, qui constitue pourtant une part importante de la culture. La recherche scientifique stricte et désintéressée était autrefois qualifiée de « travail de moine ». Pas tout à fait faux. Non seulement à cause de la patience qu'exigeait un tel travail, mais aussi parce qu'il n'était pas financièrement gratifiant et qu'il couvrait souvent plusieurs générations de moines. Tout présage que dans la société d'aujourd'hui les sciences humaines, y compris la théologie et la philosophie, auront plus de difficultés, car elles ne sont pas immédiatement utiles à la production ou ne sont pas économiquement rentables. Cependant, je pense qu'il est important que des personnes restent disponibles pour un tel travail. La gratuité de longues recherches philosophiques et théologiques pourrait redevenir l'objet d'une disponibilité religieuse à l'avenir.