Fioretti #1 - L'étrange rêve du petit Jean
Les fioretti de Saint Jean Bosco
40 anecdotes glanées dans la vie du saint éducateur
Textes reçus de la part du P. Piero Gavioli, sdb – Bukavu – RDC.
La clé du présent ouvrage
Sous le titre « A Michou et Line, mes grands amis » une bonne partie des récits contenus dans le présent volume a déjà paru dans le « Bulletin Salésien » français. Ces anecdotes ayant eu un certain succès auprès des lecteurs et des lectrices de tous âges on a cru bon de les réunir en volume et d’y ajouter quelques illustrations.
Le Père Jean Marie qui signait ces « billets » est un savant professeur de théologie qui habite Lyon. C’était pour lui une joie de laisser pendant quelques instants ses graves études pour venir s’entretenir familièrement chaque trimestre avec ses jeunes amis.
Pour grouper ces histoires, les compléter et les faire illustrer, un second Père a collaboré avec le premier…
Ainsi, dans ce recueil, ce sont deux fils de saint Jean Bosco qui vous parlent. Comme ils habitent l’un et l’autre dans la même maison, sise au 47 du Chemin de Fontanières, dans la proche banlieue lyonnaise, ils ont caché leur nom derrière celui de leur résidence. Voilà pourquoi ce volume est signé : D. de Fontanières… Tous les deux souhaitent que ces pages toutes simples, teintes souvent d’un brin d’humour, aident ceux qui les liront à mieux connaître et aimer celui que l’on se plaît à appeler « le joyeux Don Bosco ».
Les Auteurs
Lyon-Fontanières, le 8 décembre 1965.
L’étrange rêve du petit Jean
Don Bosco, qui devait devenir l’un des hommes les plus illustres de son siècle, vit le jour dans une pauvre ferme du hameau des Becchi, à une trentaine de kilomètres de Turin. Devenu orphelin de père dès l’âge de deux ans il vivait avec sa grand-mère paternelle, sa mère, Maman Marguerite, son demi- frère Antoine, plus âgé que lui de sept ans, et enfin Joseph, né deux ans avant lui. Ce petit pâtre piémontais serait devenu sans doute un honnête paysan, comme ses frères, si, alors qu’il avait neuf ans, un rêve mystérieux ne lui avait indiqué ce que le ciel attendait de lui.
« Il me sembla, écrit Don Bosco, que je me trouvais dans une vaste cour, près de notre ferme. Là s’ébattaient une foule de garçons dont plusieurs blasphémaient affreusement. Scandalisé, je m’élançais au milieu d’eux, reprochant vivement aux uns leurs indignes propos, essayant, à grands coups de poings, de faire taire les autres. Soudain se présente à moi un vénérable personnage dont le visage rayonnait d’une telle clarté qu’elle m’éblouissait. A ma grande surprise il m’appela par mon nom puis ajouta : « Ne les frappe pas. C’est par la douceur que tu gagneras leur cœur et t’en feras des amis, apprends-leur à haïr le péché et à aimer la vertu. — Je ne suis qu’un pauvre enfant, répliquai-je. Comment voulez-vous que je fasse ce que vous me demandez ? — Justement, répondit l’inconnu, parce que cela te paraît impossible, rends-le possible en m’obéissant ! — Mais qui êtes-vous pour me parler de la sorte ? — Je suis le Fils de Celle que ta mère t’a appris à saluer trois fois le jour. — Maman m’a également dit de me méfier des gens que je ne connais pas. Dites-moi votre nom ! — Demande-le à ma Mère, me dit l’homme en se retournant. Alors je vis auprès de l’inconnu une grande et belle dame vêtue d’un ample manteau dont chaque point semblait marqué par une étoile. Elle me prit par la main et me dit : « Regarde !» Au même instant les garçons disparurent et je vis sur la cour une foule d’animaux étranges : chevreaux, chiens, chats, ours… « Voilà ton champ de travail, me dit la belle visiteuse. Ce qui va se passer en cet instant pour ces animaux tu le feras plus tard en faveur de mes enfants. » Je portais à nouveau mes regards vers la cour. En un clin d’œil toutes les bêtes se transformèrent en un troupeau de jeunes agneaux qui gambadaient autour de la Dame et de son Fils ! Bouleversé par cette vision j’éclatai en sanglots… Alors la Dame posa doucement sa main sur ma tête puis me dit : «Quand le moment sera venu, tu comprendras tout ! » A cet instant j’entendis du bruit dans ma chambre et je m’éveillai… »
Évidemment dès que la famille fut réunie pour le petit déjeuner Jean lui fit part de son rêve. Et chacun l’expliqua à sa manière… Antoine, qui était jaloux de son frère parce qu’il aimait l’étude, trancha d’un ton sec : « Tu deviendras chef de brigands plus tard, c’est clair !» Joseph, qui aimait tendrement son cadet poursuivit : « Tu garderas peut-être des moutons et des brebis ! » Songeuse, la bonne Maman Marguerite murmura : « Peut-être deviendras-tu prêtre ? » La grand-mère clôtura ce bref débat par un argument d’expérience : « Il ne faut pas attacher d’importance aux rêves ! »
Pour une fois la vénérable aïeule manquait de clairvoyance… Le ciel avait bel et bien parlé à son petit-fils en cette mystérieuse nuit. Il deviendrait prêtre et serait l’apôtre des jeunes des faubourgs. Il passerait toute sa vie, qui fut longue, à conduire au bercail du Christ les garçons que la Vierge rassemblerait autour de lui. Et ainsi se réaliserait le rêve fait à neuf ans dans la pauvre chambrette des Becchi !