Fioretti de saint Jean Bosco # 16
Un monsieur aussi pressé que généreux…
Fioretti de saint Jean Bosco
- Un monsieur aussi pressé que généreux…
Don Bosco, c’est connu, fut un perpétuel endetté.
Aussi se voyait-il souvent harcelé par ses créanciers désireux d’être payés… Par bonheur pour lui, qui ne travaillait que pour le ciel, le Bon Dieu veillait au grain, le tirant d’embarras, parfois d’extrême justesse et souvent de la façon la plus imprévue. Témoin la scène à laquelle nous allons assister…
Un entrepreneur de maçonnerie qui travaillait depuis longtemps pour notre saint ne pouvant plus payer ses ouvriers, vint lui réclamer d’urgence la somme, énorme pour l’époque, de 30.000 francs-or. Comment trouver pareille fortune quand on a une caisse habituellement vide et trois cents bouches à nourrir ?
Don Bosco se le demandait avec la même perplexité que vous-même… tout en recevant d’innombrables visiteurs dans son bureau. Et voici que se présente à la conciergerie un inconnu, à la mise plutôt soignée, qui demande à le voir immédiatement. Le concierge accompagne le visiteur jusqu’à l’antichambre du saint où attend l’entrepreneur lui-même, bien décidé à ne pas repartir les mains vides.
Veuillez-vous asseoir, Monsieur, dît le concierge en tendant une chaise au nouvel arrivant
- Il me faut parler tout de suite à Don Bosco, insiste l’inconnu.
- Excusez-moi, mais il faudra attendre votre tour.
- Impossible, réplique le bonhomme, je n’ai pas le temps de m’asseoir. Et joignant le geste à la parole, il traverse la file d’attente, puis va frapper à la porte du bureau du saint. Ce dernier vient ouvrir et demande à voix basse : « Vous désirez, mon ami?» « Je désire vous parler, mon Père, et tout de suite ».
- Je regrette, mais il faudra prendre votre tour. Il y a là des personnes qui attendent depuis longtemps ; je ne veux pas les mécontenter.
- Je suis très pressé, Don Bosco ; il faut me recevoir. Ce que j’ai à vous dire n’est pas long. Faites-moi confiance.
Devant cette insistance le saint demande aux personnes présentes si elles permettent à cet encombrant personnage de passer avant elles. Sans attendre la réponse, notre homme est déjà dans le bureau… Il n’y a donc plus qu’à le recevoir…
- Asseyez-vous, mon ami.
- Merci, je ne veux pas m’arrêter.
- Alors dites-moi en deux mots ce qui vous amène ici…
- Pas grand-chose… et comme je vous l’ai dit ce ne sera pas long. Posant alors un petit paquet sur le bureau il ajouta : — Prenez ça, c’est pour vous. Priez seulement pour moi.
Tournant ensuite les talons l’inconnu ouvrit la porte et disparut.
Profitant de la surprise du saint une Comtesse entra, l’air inquiet.
- Il ne vous est rien arrive de fâcheux, mon Père ? demanda-t-elle. Cet homme avait une drôle d’allure. Il me faisait presque peur.
- Le mal ne me parait pas grand, dit Don Bosco en souriant. Ce Monsieur a déposé ce paquet sur mon bureau puis il s’est éclipsé en me demandant de prier pour lui. Voyons un peu quel mystérieux cadeau il m’a fait.
Le paquet, lentement déplié, laissa voir une épaisse liasse de billets de banque. Le saint les compta. Il y en avait trente de mille francs chacun, soit exactement la somme que lui réclamait l’entrepreneur. La bonne Comtesse n’en revenait pas ! Don Bosco s’empressa de faire entrer son créancier puis le prenant amicalement par le bras il lui dit : « Tenez, mon ami, nous voilà quittes ! » A son tour le brave homme n’en croyait pas ses yeux ! « Excusez-moi, murmura-t-il en rougissant. Tout à l’heure j’ai manqué de confiance en vous… mais croyez-moi, maintenant c’est fini ! »
Comme pour l’apôtre Thomas c’était une foi un peu tardive… mais l’avenir devait prouver qu’elle était sincère chez le dévoué entrepreneur.