Fioretti de saint Jean Bosco-35

Une migraine qui se déplace…

Fioretti de saint Jean Bosco-35

Fioretti de saint Jean Bosco

  1. Une migraine qui se déplace

C’était un soir de l’année 1885. Don Bosco arrive à Marseille où il a fondé depuis bientôt dix ans une école et un patronage. Accueilli avec la joie que l’on devine, il a promis de célébrer la messe le lendemain matin dans une église de la ville puis de faire une conférence aux bienfaiteurs de ses œuvres. Or, le lendemain, à l’heure de la messe, point de Don Bosco en vue ! Son secrétaire frappe à la porte de sa chambre. Serait-il encore couché, lui d’ordinaire si matinal ? Mais oui… Voilà que du fond du lit une voix faible répond : « Entrez ! »

— Excusez-moi, mon Père, dit le secrétaire, mais c’est l’heure de votre messe ! L’église, est paraît-il, pleine de fidèles et le curé vous attend.

— Mon pauvre ami, gémit le saint, j’ai attrapé cette nuit, je ne sais comment, une migraine épouvantable. Il me semble que l’on me frappe à coups de marteau dans la tête. Evidemment je n’ai pas fermé l’œil. Impossible maintenant de me lever. A moins que… ajoute le malade.

— A moins que quoi ? demande le secrétaire intrigué.

— A moins que tu veuilles te charger de mon mal. Dans ce cas je pourrai aller jusqu’à l’église puis faire ma conférence…

Devant l’étrangeté de la proposition, le secrétaire pouffe de rire et dit en se sauvant : « Donnez-moi tout ce que vous voudrez, Don Bosco, mais de grâce levez-vous ! »

Le malheureux compagnon du saint était à peine arrivé dans sa propre chambre qu’il pousse un cri et doit s’appuyer au mur pour ne pas tomber. Il lui semble que soudain sa tête a été serrée dans un étau et qu’elle va éclater ! Péniblement il se traîne jusqu’à son lit puis s’y étend, cherchant, mais en vain, d’où ce mal subit a pu lui venir.

Pendant ce temps Don Bosco s’est levé, est descendu de sa chambre, puis, s’est rendu à l’église paroissiale où la foule l’attend avec impatience. Il célèbre la messe, distribue d’innombrables communions, enfin après un rapide petit déjeuner, il fait la conférence annoncée.

Lorsque tout fut terminé il revint à l’Oratoire Saint-Léon où se trouvait son malheureux secrétaire. En entrant dans sa chambre il lui dit avec le sourire : « Tu m’as rendu un fier service, sais-tu ? J’ai pu faire face à tout ! Mais maintenant cela suffit ! » Et tandis que le saint délivrait son compagnon par une simple bénédiction, lui, reprenait le mal à son propre compte. Curieuse illustration, à vrai dire, de la mystérieuse « communion des saints » qui n’est pas uniquement réservée aux rapports entre les membres de l’Eglise Triomphante et ceux de l’Eglise Militante. Que d’âmes généreuses offrent ici-bas, sur leur couche de malade, dans leur cellule de cloîtré, des souffrances destinées à préserver d’autres membres du Corps Mystique ! Rappelons-nous sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus marchant péniblement dans le jardin de Lisieux pour qu’un missionnaire vole allègrement au secours des âmes à lui confiées. Peut-être oublions-nous trop souvent cette méthode authentique d’apostolat par « ricochet » ? Don Bosco nous en fait heureusement souvenir…