L'OBÉISSANCE COMME OUVERTURE
Obéissance - 2
L'OBÉISSANCE COMME OUVERTURE
(cf. T. J. van Bavel, Le cœur de la vie religieuse)
L'ouverture est nécessaire pour qu'une personne soit heureuse. Parce que seul l'amour donne à une personne la sérénité, la paix et le bonheur. Il va sans dire que la paix et le bonheur ne sont jamais absolus dans notre situation. Pourtant, tout le monde souhaite les posséder au plus haut degré possible. Aimer et être aimé, être soi-même et être accepté par les autres sont les lois psychiques d'une humanité équilibrée. Par conséquent, dès la première existence humaine, chaque personne doit apprendre à se donner. Nous avons déjà suffisamment souligné comment l'humanité se développe nécessairement par rapport aux autres et au monde environnant. Ce n'est que dans ces relations que l'être humain devient lui-même ou devient ce qu'il est. Lorsque l'ego ne peut pas s’épanouir pleinement ou lorsque la relation d’amour ne se développe pas suffisamment, cela signifie inévitablement une mutilation de sa propre personnalité, qui se manifeste généralement dans une sorte de trouble mental. Celui qui reste fermé en lui-même ne peut pas entrer dans une relation d’amour, ce qui suppose toujours de sortir de soi. Ce processus n'est jamais achevé ; cela continue toute une vie. Toujours, on est appelé à sortir de soi et à aimer.
Dans ce contexte, il faut placer l'obéissance. Une personne qui entend et écoute quitte l'isolement de son propre soi et, pour ainsi dire, se met dans un espace ouvert. Là, il entend l'appel des personnes et des choses autour de lui. Cependant, cet appel n'est pas sans engagement. C'est une invitation à prendre position et à faire quelque chose. Chaque appel est également un appel lancé à une personne. Répondre à un appel, c'est répondre avec une action. L'obéissance, c'est donc oser se détacher de soi-même pour s'ouvrir à la réalité dans laquelle on vit. L’on peut aussi l'exprimer ainsi : l'obéissance, c’est permettre une remise en question par la vie. La vie n'est pas toujours la confirmation de nos propres habitudes, opinions, comportements, position, méthode de travail ou sécurité. Au contraire. La vie nous interpelle régulièrement. On nous demande de répondre à autre chose que ce que nous voudrions nous-mêmes. Chaque moment peut nous réclamer quelque chose d'une manière étonnamment nouvelle, abandonnant un aspect de notre situation familière dans laquelle nous nous sommes nichés. Toute la vie est une grande interaction entre la question et la réponse.
Se détacher de soi-même est toujours lié à la mortification. Dans la rencontre, je me trouve devant l'autre personne, avec ses questions et ses désirs, ce qui signifie autant d'appels pour moi. Lors de la rencontre, j'entends l'autre. Ensuite, je peux me laisser déterminer par la voix qui me parle et répondre à cette voix. Ce n'est que lorsque j'entends que je peux librement appartenir à quelqu'un. Ainsi, entendre un appel conduit à l'acte d'obéissance. Et donc la vie, qui est nécessairement une vie avec et pour les autres, forme un merveilleux ensemble d'autonomie et d'obéissance, de liberté et de nécessité.
Bien sûr, chacun doit écouter sa propre conscience. Mais cette conscience doit également être formée. Après tout, suivre sa propre conscience peut devenir un slogan dénué de sens, qui ne sert qu'à se protéger et à s'encapsuler. Ensuite, cela devient une autodétermination aléatoire, qui élimine simplement la grâce de la rencontre. J. Montaurier écrit à ce sujet dans son roman "À travers le feu" : "Socrate serait tombé moins courageux s'il avait choisi les circonstances de sa chute, car des siècles de pensée humaine ont déterminé que rendre son âme dans la nuit de l'obéissance signifie mourir dans la lumière ». Il faut en dire autant de l'obéissance de Jésus : les gens l'ont réclamé jusqu’à sa mort. En conséquence, il est devenu le serviteur disponible par excellence. L'obéissance non incarnée dans la rencontre des personnes et dans l'amour des relations humaines n'est pas une obéissance réelle, mais une auto-illusion. Telle est l'obéissance : se tenir dans l'ouverture de l'amour en tant que personne à l'écoute et disponible.