OBÉISSANCE ET AUTORITÉ

Obéissance - 6

OBÉISSANCE ET AUTORITÉ

OBÉISSANCE ET AUTORITÉ

(cf. T.J. van Bavel, Le coeur de la vie religieuse)

Dans la même perspective, il faut placer l'autorité. L'obéissance et l'autorité vont de pair comme « entendre » et « dire ». L'autorité ne signifie jamais l'arbitraire ; cela ne signifie jamais « être en charge » ou considérer de prendre des décisions par vous-même. Seul celui qui a « quelque chose à dire » a autorité. Et seule la personne a quelque chose à dire lorsqu’il évoque quelque chose de précieux, quelque chose d'important. Nous disons que certaines choses n'ont pas de sens ; cela signifie qu'elles n'ont aucune importance et aucune valeur pour nous. C'est pourquoi l'autorité est plus qu'un concept juridique. On peut être en autorité et pourtant ne pas avoir la moindre autorité sur les autres. La raison de ce phénomène bien connu réside dans le fait que l'autorité - comme l'écoute - n'est pas une activité extérieure, mais intérieure. Il doit toujours y avoir une valeur à entendre dans l'autorité.

Cela signifie que l'autorité doit également s'ouvrir à la valeur en jeu. Il doit représenter, interpréter et exprimer une certaine valeur. Aucun homme n'a de l’autorité par lui-même, mais chacun tire son autorité de quelque chose au-dessus de lui, de la valeur à laquelle il obéit lui-même. Celui qui exerce de l’autorité est également soumis à une valeur à laquelle il est lui-même lié.

Tout comme les autres membres d'une communauté religieuse sont liés par cette valeur, la figure d'autorité l'est aussi. Comme les autres, il doit également être attaché à cette valeur. C'est pourquoi nous disons qu'une communauté religieuse est un groupe de personnes qui écoutent ensemble l'évangile. Face à l'Évangile, personne ne se tient seul au-dessus d'un autre. Mais les membres de la communauté donnent à quelqu'un la direction afin d'écouter ensemble. Une personne est chargée de la responsabilité particulière de protéger, de sauvegarder les valeurs communes et d'interpréter les exigences de l'objectif commun. La figure d'autorité est le porte-parole de la valeur que tous veulent viser. Dans le leader, tout le monde veut s'entendre soi-même, même lorsque le leader dit des choses qu'on n'aime pas entendre, ou rappelle des exigences qu'on préfère oublier à un moment donné. En ce sens, l'autorité dans une communauté religieuse est toujours une référence au Christ et à l'Évangile. Dans le même sens, on peut aussi dire que dans la tâche du responsable il faut voir une responsabilité de soi-même à soi-même.

Par conséquent, une autorité bien exercée ne contredit pas en fin de compte les intérêts ou l'autonomie de l'individu. Au contraire, dans la mesure où une figure d'autorité sert la valeur commune, il sert aussi le groupe. Ainsi, l'autorité au sens plein du terme devient service. Placé lui-même sous l'Évangile, le responsable devient le serviteur de tous. À l’encontre de l’obéissance, le responsable expérimentera et acceptera également ses limites. De cette façon, il sera prêt à écouter les autres membres de la communauté, car l'idéal commun aura également une voix en eux. L'autorité doit être basée sur la compétence, l'habileté, la capacité et le charisme. Cependant, personne ne la possède seul ou d'une manière parfaite. Certes, à une époque où la vie se complique de plus en plus, il faudra répartir les responsabilités et les porter ensemble, avec le même amour désintéressé du but commun. Le pluralisme n'est alors plus un danger, mais il peut signifier un réel enrichissement mutuel. Mais cela n'est possible que si personne ne veut absolutiser son propre point de vue ou ne jure que par son propre évangile.   Il est vital pour une communauté religieuse que chacun, y compris les responsables, reste docilement ouvert à l'unique évangile dans le sens de sa propre pauvreté. Ainsi l'obéissance s'avère être plus qu'un exercice de foi ; c'est aussi une expression de soutien mutuel et d'amour, visant à réaliser ensemble la liberté de l'Évangile.