PAUVRETÉ DU COEUR

VOEU DE PAUVRETE - 5

PAUVRETÉ DU COEUR

PAUVRETÉ DU COEUR

(cf. T. J. van Bavel, Au cœur de la vie religieuse)

Jusqu'à présent, il y a eu régulièrement question du détachement économique et de la pauvreté. Pourtant, la pauvreté n'est pas exclusivement liée à la matière. Le cœur est également impliqué. Car quelqu'un qui est matériellement pauvre peut être consommé par l'avidité. Et une personne matériellement riche peut avoir une attitude de vie d’un pauvre. Saint Augustin s'exprime ainsi pour dire combien grande est la part du cœur : "Celui qui lâche non seulement ce qu'il a, mais aussi tout ce qu'il veut avoir, lâche le monde entier."

La Bible en particulier nous montre un champ très riche de significations de la pauvreté. Dans la Bible, surtout à partir des prophètes, la pauvreté prend le sens particulier d'une attitude de l'esprit et d'une spiritualité. Les différents mots bibliques pour ‘pauvre’ peuvent être traduits comme suit : modeste, calme, doux, nécessiteux, docile, soumis, limité, humble, simple, sans pouvoir ni influence, sans possession, ne s'appuyant pas sur soi, ouvert et réceptif au salut. Toutes ces descriptions sont liées à l'attitude de l'homme envers Dieu : se tenir envers Yahvé comme une personne pauvre. Cependant, cette attitude pauvre envers Dieu ne reste pas contenue dans une tour d'ivoire. Cela influence et change radicalement l’attitude envers nous-mêmes et nos semblables.

Si Albert Camus décrit la pauvreté comme une condition pour découvrir l'existence réelle et nue de l'homme, sans que cette existence ne puisse plus se cacher derrière la richesse, l'honneur, le pouvoir ou l'idéologie, combien plus cela s'applique-t-il à notre relation à Dieu. Tout le monde devient vraiment pauvre face à la Vérité. La pauvreté est l'attitude la plus fondamentale envers Dieu : petite, dépendante et accueillante.

Quiconque trouverait cette expérience religieuse trop abstraite peut tourner son regard vers l'attitude de vie de Jésus qui, par son dépouillement (kénose) et sa non-appartenance à lui-même, était par excellence celui qui s'est abandonné. Jésus vivait détaché de lui-même ; mais c'est précisément en cela qu'il se trouva. Pour un chrétien, vivre pauvre signifie vouloir vivre l'attitude de la kénose de Jésus dans sa propre existence.

Ce n'est pas dans les choses contrôlées et comprises par nous que nous trouvons la lumière ultime et la sécurité salvifique pour nous-mêmes, mais dans le mystère intouchable de Dieu qui éclipse nos vies. Dépendant de lui-même seul, l'homme ne s'en sort jamais, car il a toujours besoin de plus et parce qu’il a plus de signification qu'il ne peut se donner. Jésus l'a également clarifié pour nous dans sa relation avec son Père. Mais la relation de Jésus à Dieu serait restée un jeu de belles paroles s'il n'avait pas mis cette relation en pratique dans sa vie quotidienne, à la fois dans sa vie personnelle et dans ses relations avec les autres. Pour nous, un certain nombre de conclusions importantes en découlent, tant sur le plan personnel que sur le plan de nos relations avec les autres.